lundi 18 juillet 2011

des verres d'eau avec des petites mouches dedans


-        Ça te tente tu d’aller manger des choses grasses? On dirait que j’ai pas mangé de la semaine. J’ai faim. J’ai passé toutes mes journées au lit pis tu m’as manqué.

Là tu m’as échoeuré parce que j’avais pas fait la litière du chat.

-          Franchement c’est pas compliqué t’aurais pu ramasser au moins quelques crottes.
-          J’te l’ai dis j’ai passé la semaine au lit j’ai même pas ramassé le séchage j’ai même pas remis les têtes d’oreillers (oui ça faisait une semaine que les oreillers avaient pas de têtes).
-          T’étais en dépression parce que j’étais pas là.
-          C’est ça j’pense que oui mais là t’es revenu. Faque demain on fera la litière. Mais ce soir on peut tu aller manger des choses grasses on dirait que j’ai pas mangé de la semaine.

On a marché. Il faisait noir en maudit, le diable faisait sa ride de canot dans les airs. Il accrochait les arbres et les fils électriques. Il ventait et tonnait fort au dessus de nos têtes. T’avais peur à cause des gros arbres que la foudre nous tombe sur la tête. J’ai pensé on n’est pas si chanceux que ça m’semble, mais on a quand même fait un plan.

-          Si un éclair tombe il va tomber sur l’arbre, pas sur nous. Il faut juste courir assez vite pour pas se faire bruler ou écraser.
-          Pis après on va s’acheter un billet de loto tsé.

 On traversait les rues super vite en courant parce qu’on se sentait tout nus pas d’arbres au dessus de nos têtes venteuses pour attraper les éclairs. Je riais à tout ce que tu disais. Je disais que c’était parce que j’étais fatiguée. C’est vrai j’étais fatiguée mais ça me faisait du bien de ne pas trop avoir dormi. Ça me rappelait que c’est bon de rire pour rien quand tu parles, que ça fait du bien aux joues pis à ma petite tête venteuse-tempêteuse-pour-rien.

Avant d’aller manger on est allé louer un film de l’autre côté de la rue. Y a une petite fille qui tournait sa robe arc-en-ciel sur sa bédaine avec ses doigts collants qui est entré avec ses parents dans le club vidéo avant nous.

-          Fuck je suis certain qu’elle va prendre le film que je veux.

C'était drôle quand même comme call. T’es entré et tu t’es dépêché de prendre la dernière copie du film de lézard animé. Après pour faire comme si tu te rendais pas compte qu’une petite famille bédaine arc-en-ciel voulait vraiment le film que tu tenais dans tes mains, tu t’es promené dans les allées en regardant les autres films. La petite fixait le film de lézard dans ta main. J’étais certaine que tu allais craquer et lui donner. C’était beau de vous voir désirer autant un film de lézard animé. T’es costaud pour un enfant mais dans ces moments là c’est clair, t’as pas grandi.

Mais t’as changé.

On est sorti et j’ai mis le lézard dans ma sacoche. T’étais content.

-          J’étais sure que tu allais lui donner.
-          Maintenant je pense à moi. De toute façon c’était pas vraiment un film pour enfant, j’ai lu les critiques. Je lui ai sauvé une soirée.
-          Elle va surement le louer la semaine prochaine.
-          Pas grave.

On est arrivé au restaurant festival-de-la-crevette-à-longueur-d’année. T’as pris une assiette de cuisses de poulet. Tu t’obstines à essayer tous les plats à la place de prendre une poutine ou un hamburger comme tout le monde parce que

       -    Je les aime pas les frites ici bon.

Moi j’ai pris

       -    Un cheese burger avec du bacon pis de la salade pis des tomates pis une petite frite s'il vous plait.

J’aime pas être déçue.

La fille m’a amené de la sauce bbq avec mes frites pis j’étais super impressionnée parce que j’avais pensé dans ma tête que ça serait bon pis que je l’avais pas dis à voix haute.


-          Comment t’as fait pour deviner, t’as lu dans mes pensées?
-          Ah non c’est pour le poulet. Tu en veux toi aussi?
-          Ah ouais s'il te plait.

Elle m’a amené de la sauce bbq.
Faut que je me résigne.
Ça existe pas le monde qui lisent dans les pensées.

On a mangé en regardant du rodéo pis même qu’à un moment donné ils nous ont montré une entrevue avec un petit garçon cowboy assis sur un poney et il s’appelait quelque chose comme Buk mais je me rappelle plus de son nom de famille. C’était beau d’être là avec les photos de nourriture déteintes pis un texan qui gueulait en arrière pis le tonnerre dehors pis la pluie qui tombait fort pis moi qui avait envie de rire tout le temps pis toi qui riait parce que je riais pis la bouffe vraiment pas bonne pis le rodéo pis les serveuses crêpées qui lisaient pas dans les pensées pis la sauce bbq pis les sachets de ketchup pis le pouding au chocolat qui avait l’air tellement bon de la madame trop lente d’à côté.

On s’est lavé les mains avec nos petites serviettes mouillées. Tes mains sentaient bon l’enfant, ta face sentait bon l’enfant, j’avais le goût de te manger les joues même si j’avais pu faim du tout. C’était beau de se retrouver pis de se rappeler que c’est beau quand on s’aime de même. Ça rend toutte beau. Même les tempêtes. Même les madames crêpées qui sourient pas. Même les verres d’eau avec des petites mouches dedans. Même les enfants cowboy qui se font trainer dans la bouette par leur poney.
Même les frites brulées.

Même la sauce bbq avec des mottons.



Pis en revenant t'as failli nous crever les yeux avec mon parapluie vraiment hi-tech qui se referme automatiquement. Il s'est refermé sur nous, j'ai crié parce que c'était froid en maudit et t'as regardé le parapluie tout surpris en disant

         -   Voyons c'est dangeureux ça. 

Quand t'as compris que c'était toi qui avait fermé le parapluie tu as chialé parce que

         -   C'est quoi l'idée stupide de mettre un gros bouton qui referme le parapluie sur le manche pour le tenir.

Pour toi c'était impossible de tenir le manche sans appuyer sur le bouton.

Je suis encore crampée.

Maudit que t'es pas doux.


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