samedi 11 juin 2011

Cravate.

J’aurais juré que c’était toi. Sur le côté droit de la scène. Mon ami m’a fait remarquer que presque tous les gens autour de nous étaient habillés comme Toulmonde. Je lui ai dis que c’était comme ça dans les spectacles de musique. J’me tiens avec des gens qui ressemblent à Toulmonde. Dans les shows souvent ça m'arrive de les voir partout, mes amis petits-barbus-lunettés.
-          J’ai tu l’air de Toutlmonde moi?
-          Non pas toi.
Toi non plus. T’étais accoté sur le mur du côté droit de la scène. T’avais une bière une chemise bleue pâle pis une cravate. T’avais l’air de sortir du bureau. Trop sérieux. Qu’est-ce que tu faisais là ? J’aurais juré que c’était toi. La même p’tite bette d'enfant, mais en cravate.
J’t’ai regardé milles fois. Juste pour être sure. Je voulais être vraiment vraiment sure. J'voulais être sure qu'après que mon regard ce soir retourné la p'tite subtilité qui faisait que c'était pas toi s'envolait pas. J'voulais pas que ça soit une blague de la vie de faire que j'te reconnaisse pas. Je te regardais du coin de l'oeuil pour la checker, la p'tite subtilité. Étais-tu vraiment aussi grand que ça?
Une p’tite fille super trop énergique avec des cheveux court frisés habillée comme Toutlmonde (mais avec un petit top blanc d’où on voyait dépasser juste un peu sa brassière noire aussi) t’as tombé dans l’œil. Ou tu cherchais juste à ramasser quelque chose qui tombait ce soir là. Comme la tempête dehors qui nous tirait milles saletés dans les yeux. Ché pas. Moi aussi j'avais des saletées dans les yeux, les maudites subtilitées. C'était jour de tempête. On pouvait pas faire autrement.
T’étais pas habillé comme Toulmonde pis moi non plus. Moi avec mes jeans bleu pâle trop déchirées pis toi avec ta chemise bleu pâle bien repassée. On fittait pas sauf pour c'qui est de la couleur du ciel. Moi le ciel, il me serrait l'entre-jambe et il laissait passer mes genoux et des bouts de cuisses dans du fil comme des nuages. Toi le ciel, il était soigneusement glissé dans ton pantalon. Est-ce que c'était des mains de fille qui t'avaient aidé à rentrer le ciel dans ton pantalon? (parce que j'aurais été un peu jalouse de ça)

On fittait pas. Pantoute. J’me rassurais en me disant que c’était pour ça que tu me regardais pas. J'me rassurais en me disant que c'était pas parce que tu m’avais oublié. Mais tu me connaissais pas. Pis t'avais des saletées frisées dans les yeux. C’était surement la tempête. Ou Toulmonde. Qui me faisait ça.
J’étais jalouse d’la petite femme-fille Toulmonde frisée. T’es même allé la rejoindre à la fin de la soirée.
J’me demandais comment ça s’pouvait qu’un gars en chemise bleue pâle avec une cravate aime cette musique là. Mais tu chantais fort en fermant les yeux. Comme moi. Ton grand corps (t'étais vraiment pas aussi grand que ça) sautait aussi. Tu devais écouter ça en cachette dans ton bureau fermé devant ta grande fenêtre.
Y a une chose qui te trahissait. Ta cravate. Elle était toute bien entortillée et ses petits coins en bas étaient bien pliés bien retournés. Elle dansait elle avec, elle volait. Ça pouvait pas faire autrement qu'être toi. Qui savait plier les cravates comme des avions en papiers. Les avions c’était toi. Tu devais écouter ça en construisant des avions. C’est le genre de musique qui doit bien faire voler les avions, que j'me disais.
J’aurais juré que c’était toi sur le côté droit de la scène. À cause d’la bette d'enfant pis des avions.

Mais y a des personnes, des moments, qui s'effacent. Pis qui nous laissent juste un p'tit souvenir chiffonné. Pis après même si tu mets tes fesses dessus pendant toute une journée, même si tu danse comme une folle sur place pour le piétiner, y a rien à faire. Y r'vient pu. Jamais. Comme avant.

C'était pas toi.
Dehors y faisait tempête. On avait tous des saletées dans les yeux. Mais ton corps était plein de ciel pis le miens avec.

Ça pouvait pas être toi. Trop chic. Toi, t’aurais vraiment fitté avec la musique.

Faque j'ai fermé les yeux. Je me suis laissé bercer par Toulmonde. Pis j'ai chanté fort. Vraiment fort. Le plus fort que j'ai pu.

1 commentaire:

  1. le dehors change mais le dedans non. on grandi, on se met une cravate ou une jupe secrétaire. on devient des grands de l'extérieur mais en dedans, ça reste pareil. on restera toujours des enfants avec un ciel bleu trop grand. pis des trous dans le coeur à saveur de gomme balloune.

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