vendredi 3 juin 2011

Maudit



À deux on était une belle paire d’épaules écrasées. Couchés. Côte à côte. Étourdis. Sonnés par la folie des moments d’éternité qui commencaient à pointer le bout de leurs nez. Autour de nous autres, la soirée. Pis ses p'tits morceaux. Ils mouraient, la soirée avec ses p'tits morceaux d'invités. Épaule gauche épaule droite écrasées. Nous autres. On était immunisés.
J’aurais du me laisser porter que'que part là-dedans, entre le trop bon pis le juste assez bon, pour pas que ça pogne dans l'ventre. Pour que ça chatouille dans l'ventre juste. Comme un nid de fourmis dans une épaule. Mais j’ai pensé. Pis j'me suis dis je vais fermer les yeux juste-une-p'tite-seconde. Pis j’ai plongé dans le bon jusqu’au fond mais trop dans l'fond comme dans trop c'est comme pas assez. Pis j’me suis endormie. Maudit.
La plupart des histoires qui meurent, meurent comme ça. On s'endors. On pense que demain on va s’en rappeler.
Pis demain on s’en rappelle pas.
Demain c’est pu l’éternité.

Pis on se réveille poqué pis on se d'mande pourquoi on mal à l'épaule pis on se rappelle pas. On se doute même pas qu'y a une autre épaule que'que part qui conduit un char en se disant eille-j'ai-mal-pis-j'sais-même-pas-pourquoi.
Le même mal. Y'é resté figé. Y'électrisera pas l'corps de personne.
On a manqué l'éternité. Une histoire morte encore.
Maudit.

Sauf que ça m'console de m'dire que les histoires qui vivent des fois c'est maudit aussi.

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